Simone de Beauvoir à Uzerche

UZERCHE

Simone de Beauvoir : le matin des origines
par Yannick Beaubatie
(extrait)

Durant toute sa jeunesse, Simone de Beauvoir passe ses étés au château de Meyrignac (commune de Saint-Ybard, près d’Uzerche), où son grand-père, en 1880, avait créé un « parc paysagé » dans lequel, « barrée de cascades artificielles, fleurie de nénuphars, la rivière anglaise où nageaient des poissons rouges enserrait dans ses eaux une île minuscule que deux ponts de rondins reliaient à la terre », ou bien encore à celui de la Grillère, propriété du mari de sa tante (Hélène, la sœur de son père), situé à une vingtaine de kilomètres, en Haute-Vienne.

Le Limousin, « terre sensible et rebelle », a pu représenter, tout au long de son enfance, non pas un havre au sein duquel se réfugier, mais ce qu’Ernst Jünger appelle un « asile de la vie », un de ces lieux secrets où l’insurgé reprend son souffle : « ici la grande surprise des forêts est la rencontre avec soi-même, le noyau inaltérable du moi, l’essence dont se nourrit le phénomène temporel et individuel » (Traité du rebelle, ou le recours aux forêts).

Et cela explique peut-être l’étonnement de Maurice de Gandillac, son condisciple à la Sorbonne, lors d’une halte au château de la Grillère : alors qu’il ne voyait en elle, lorsqu’il la croisait à Paris, qu’une « pure intellectuelle », il découvre, dans cette campagne apparemment si sage, une jeune femme qu’un lien « très intime » unit à la « nature », et qui, en compagnie de sa sœur et de sa cousine, ivres, toutes les trois, d’une « allégresse champêtre », « roule sur le gazon », se baigne dans la Vézère, marche pieds nus, et « se plaît même à manger de l’herbe ».

Il avait, à cette occasion (comme il le raconte dans Le Siècle traversé), invité « le Castor » et sa sœur Hélène à l’accompagner d’Uzerche à Périgueux, chez une amie, sa logeuse, à laquelle il souhaitait, depuis longtemps, présenter ces deux « merveilles ».

[…]

Extrait de l’ouvrage : Balade en Limousin, sur les pas des écrivains (c) Alexandrines, mars 2009

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