TOULOUSE
Pèire Godolin, un maître en langue occitane
par Pierre Escudé
(extrait)
Au cœur de Toulouse comme de l’imaginaire érudit et populaire occitan de l’époque moderne, se situe l’œuvre du poète Pèire Godolin (prononcer Pèyré Goudouli).
Godolin (1580-1649) n’a laissé quasiment aucune trace biographique. On sait que son père, originaire de l’Armagnac, était maître chirurgien et que sa mère venait de l’Albigeois. Il est né rue de la Treille – actuellement dans le « moulon » de l’Hôtel d’Assézat de Toulouse –, et a été baptisé le 14 juillet 1580. Aîné de trois frères, il a fait des études d’avocat pour sans doute ne jamais plaider. Personnage central de la scène toulousaine de tout le premier xviie siècle, Godolin est tout entier dans son œuvre.
Car de la fin de l’Humanisme au début de la provincialisation, Godolin chante et représente l’espace complexe et diffracté d’une société clivée, en pleine mutation : société toulousaine, capitale ultra-catholique farouchement ligueuse et pourtant libre et effervescente ; société des États de Languedoc, riche Province méridionale du premier royaume d’Europe ; société du Parlement toulousain, le second de France et dont le ressort va d’Armagnac au Forez.
Alors que l’on sort de la longue parenthèse des guerres de Religion (1562-1596), notre jeune poète s’adonne à une poésie libre, légère et joyeusement épicurienne. Sept ans durant il s’essaye en vain à percer ce temple de la représentation officielle toulousaine, le Collège de Rhétorique devenu cénacle réactionnaire de langue française, si loin de la source de la Sobregaya Companhia dels Sèt Trobadors (1323). La protection du brillant Adrien de Monluc, faisant de Toulouse dès les années 1615 sa cour principale, permet à l’écriture de Godolin de s’imposer brusquement comme l’étalon de la tonalité poétique nouvelle.
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Extrait de l’ouvrage : Balade en Midi-Pyrénées, sur les pas des écrivains (c) Alexandrines, mai 2011