RIBEMONT
Condorcet et la terre picarde
Par Marcel DORIGNY
(extrait)
Condorcet, pourtant « citoyen du monde » par ses multiples engagements intellectuels et politiques, est resté profondément attaché à sa terre natale picarde : c’était là qu’il venait régulièrement se reposer, écrire, correspondre avec ses amis dispersés à travers la France et l’Europe, gérer ses affaires.
Ribemont fut d’abord la région où il vit le jour, où il grandit au sein de sa famille maternelle, les Gaudry, où il se forma à la vie sociale simple d’une bourgade de province. Toute l’histoire de sa famille fut baignée par la Picardie. La fortune foncière des Gaudry n’était pas mince : avec l’équivalent de plus de 350 hectares, il est vrai dispersés en de multiples parcelles, c’était un patrimoine qui donnait aisance et prestige social. Le revenu de ses terres fournissait l’essentiel du train de vie de la famille. Condorcet en hérita en 1785, ce qui lui procura une incontestable amélioration de son revenu, juste au moment de son mariage avec la jeune Sophie de Grouchy. Ce fut même par la vente d’une centaine d’hectares de ses biens picards qu’il put acheter le château de Mantes, à deux pas de Paris. Mais, jusqu’en 1781 au moins, Condorcet fréquenta régulièrement la maison familiale de Ribemont, y séjournant de longs mois, aussi bien en été qu’à la mauvaise saison. Ensuite, et jusqu’aux jours sombres de son entrée en clandestinité, en juillet 1793, il continua de venir chez son oncle, qui était également son parrain. Ce fut donc par les liens de la terre et de la famille que celui qui était devenu l’un des personnages les plus en vue de la République des lettres revenait régulièrement en Picardie, conservait un contact étroit avec la société paysanne de son enfance, pouvait y confronter ses prises de positions politiques aux réalités des rapports sociaux.
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Extrait de l’ouvrage : Balade dans l’Aisne, sur les pas des écrivains (c) Alexandrines, mars 2007