Redonne Cendrars

-la-Redonne

Cendrars aux vents du Midi

par Annie Lachaise

 

Cendrars, n’est ni méridional, ni même français de souche. Mais, Français « selon (s)on cœur », il aime cette patrie d’adoption au point de signer son engagement volontaire en 1914 dès la mobilisation et de se retrouver affecté au 1er régiment étranger de Paris

C’est en effet auprès de la France qu’il a décidé de se battre en 1914, perdant son bras droit dans la bataille de la Marne en octobre 1915, après l’assaut de la ferme Navarin. Sa renaissance aura lieu à Méréville en 1917, dans la grange de La Pierre où une illumination pascalienne le touche et lui permet sa « plus belle nuit d’écriture » avec le scénario de « La fin du Monde filmée par l’Ange Notre-Dame ». Puis c’est à nouveau la guerre et avec le malheur qu’elle apporte, un nouveau blocage.

Le Midi sera une échappatoire à laquelle il aura recours essentiellement deux fois : la première suit la mort de son père en 1927 et des déceptions diverses. Il fait alors un premier séjour assez bref à La Redonne où il déclare n’avoir jamais pu écrire plus de trois lignes à cause du « panorama » « grandiose » et de la puissance de vie qu’il y trouve. Sans doute y fait-il un retour rapide quelques années plus tard, sans y séjourner et déplorant « l’hôtel moderne » qu’on y construit. Mais son deuxième passage conséquent en Provence, nettement plus étendu dans la durée et plus productif en écriture, se fera à Aix-en-Provence, de 1940 à 1947. Pourtant, si le lieu de la Redonne ne donne rien dans l’immédiateté, il permet la gestation d’une œuvre qui n’est pas la moindre : Les Confessions de Dan Yack. Il alimente également un chapitre essentiel de L’Homme Foudroyé, Le Vieux Port, écrit à Aix dès 1943, après une « panne » d’écriture de trois ans et illustré par les lithographies de René Rouveret dans l’édition de luxe de 1946. Car, de 1940 à 1943, le cataclysme qui submerge le pays et sa propre invalidité au combat paralysent Cendrars jusqu’au dégoût. Certes, il a réussi à se faire enrôler comme correspondant de guerre « chez l’armée anglaise ». Mais revenu en zone libre au moment de l’armistice, il lui faudra le déclic provoqué involontairement par son ami l’écrivain Édouard Peisson pour retrouver son allant de poète. C’est alors l’avènement d’une forme nouvelle d’écriture entre l’autobiographie, la fiction et la poésie. De là, naîtront quatre volumes inclassables, « Tétralogie » particulière, où souvenirs et invention sont savamment mêlés. L’écrivain parachève la construction de son mythe à travers ce tissage du réel et de la fiction. Les critiques parleront de « temps retrouvé » à la manière de Proust, sans la nostalgie de ce dernier. Car Cendrars retrouve le salut dans sa création littéraire. « Écrire c’est brûler vif », mais pour renaître…

 

Extrait de l’ouvrage : Balade en Provence, sur les pas des écrivains (c) Alexandrines, mars 2012

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