Renaud Camus à Plieux

PLIEUX

Renaud Camus, l’écrivain en Gascogne
par Stéphane Baumont
(extrait)

Églogues, élégies, éloges, chroniques, journal, romans, récits, répertoires, miscellanées, topographies, vaisseaux brûlés, écrits sur l’art, écrits politiques, manuels, entretiens, théâtre, photographie, communiqués du Parti de l’innocence, l’œuvre de Renaud Camus est comme le château de Plieux qu’il habite en poète, aux marches de la Lomagne : impressionnant, multiple, suscitant la curiosité, constitué de pierres massives, de poutres impressionnantes, pénétrant le siècle de ses mots, de ses phrases, hiératique en sa solitude. Châtelain gascon ouvrant son château au théâtre Nô comme aux expositions les plus engagées démontrant que le girondinisme pouvait tenir la dragée haute au jacobinisme parisien (Kounellis, Leroy, Quignard, Misrahi, Marcheschi) ; châtelain de toutes les saisons dans le brouillard givrant des hivers gascons ou les brumes tenaces des printemps lectourois, apportant la fraîcheur de ses textes-pierres pour abriter le lecteur invité à un lit au bord de la fenêtre, lui donnant l’impression d’être entre terre et ciel.

Habitant en poète, en prosateur, en romancier, en constitutionnaliste, en politique ce château qui le raconte autant qu’il le raconte : Vie du chien Horla (étonnant et attachant labrador, compagnon de hautes promenades sur les crêtes frontalières du Lectourois et de la Lomagne,) Graal-Plieux, La salle des pierres, Hommage au carré, L’Isolation, autant de Journaux – car il y faut mettre un « J » majuscule, celui de l’Écrivain tenant Le Journal en son Château de Plieux – qui racontent l’histoire et le génie de ces lieux comme de ses visiteurs – promeneurs – car tous les jours avec ses chiens Renaud Camus à la suite d’Emmanuel Kant, de Jean-Jacques Rousseau, de René Descartes (« Je me promène donc je suis ») effectue de longues promenades au cœur de cette Gascogne dont il aime à découvrir le castel caché, la ferme en voie de destruction, le chemin bien boueux qui longe la rivière ou le ruisseau, l’arbre couché, la pierre énigmatique, la solitude partagée au milieu des champs, des forêts, des clairières, quelquefois si loin du Château qu’on ne l’aperçoit plus : de fontaine en château d’eau, de lac en chartreuse, Renaud Camus nous fait ainsi découvrir, avec l’excellence littéraire et l’exigence sémantique et grammaticale qui le définit, avec l’audace romanesque que la Gascogne ajoute à son talent (Voyageur en Automne, Le Chasseur de lumière, L’épuisant désir de ces choses, L’Inauguration du Siècle des vents), des lieux-dits devenant mythes et légendes par la grâce de l’écriture (il faudra bien qu’un jour l’on s’attelle à la définition de la Géographie camusienne !).

[…]

Extrait de l’ouvrage : Balade en Midi-Pyrénées, sur les pas des écrivains (c) Alexandrines, mai 2011

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *