MARSEILLE
Julie Pellizzone ou l’itinéraire d’une Marseillaise
par Hélène Echinard
Mémorialiste, Julie Pellizzone est la petite-fille d’un médecin major des galères mort lors de la peste de 1720, et la fille du peintre Étienne Moulinneuf, secrétaire et co-fondateur de l’Académie de peinture de Marseille. À sa naissance, son père a soixante ans et sa mère est aussi jeune que sa demi-sœur. Julie passe une enfance heureuse dans un milieu intellectuel bourgeois et aristocratique, typique de l’esprit des Lumières, avec pour modèles son père, qui se charge de l’instruction soignée de sa fille au lieu de l’envoyer au couvent, et son parrain l’érudit Grosson.
Une aventure hors du commun la sort brutalement de ce cocon. Joseph Vincent Pellizzone, alors son voisin et membre du cercle d’amis de sa mère, l’enlève en août 1783 et l’épouse aussitôt. Il est issu d’une famille noble napolitaine, implantée depuis plus d’un demi-siècle dans notre ville. Il a vingt-neuf ans, elle n’en a pas quinze. Le couple réside entre 1787 et 1789 à Naples, approchant la cour de Ferdinand IV ; il a failli s’y établir. Pendant la Révolution, Julie accompagne épisodiquement son mari, commissaire des guerres, à Nice et en Ligurie (1794), puis à Toulon où elle côtoie notamment Bonaparte et surtout Joséphine avant l’embarquement des troupes pour l’Egypte (mai 1798). Tout le reste de son existence se passera essentiellement à Marseillle.
Les époux, sans divorcer, se séparent de fait en 1801, Julie partage alors la vie du peintre en portraits, Nicolas Étienne Girardon de quatre ans son cadet. Forte de corps et fine d’esprit, ses goûts pour la musique, le chant et la poésie animent son salon de la Canebière sous le Consulat et les débuts de l’Empire. Son mari, volage mais toujours jaloux, le lui fait fermer manu militari et lui ôte la garde de ses deux filles. Julie, après un suicide raté, se réfugie désormais dans l’écriture…
Extrait de l’ouvrage : Balade en Provence, sur les pas des écrivains (c) Alexandrines, mars 2012