Mobile, en fuite, en chasse plutôt, Gide a cette aisance, cette liberté superbe, ce regard pénétrant jeté sur autrui, presque furieux parfois, puis vite détourné, reporté aussitôt sur un objet plus fuyant, insaisissable, et, à nouveau détaché, revenant vers l’ami proche. Le voici justement qui revient, le pas vif, la tête haute, le corps élancé, le regard assuré, superbe, inquisiteur, mais déjà il a disparu.
Dans Paris, Gide bouge d’un quartier l’autre, d’une rue à l’autre. Le soir, il traîne sur les boulevards, seul ou avec son ami Henri Ghéon, son « franc camarade », son compagnon d’escapade qui partage les mêmes goûts sexuels, pour les hommes, ou plutôt pour les très jeunes gens. Ou encore avec Charles-Louis Philippe, de cinq ans son cadet, fils d’un sabotier et fonctionnaire municipal, intarissable sur la littérature et les femmes, vidant sec son verre d’absinthe et causant à n’en plus finir.
Le Paris de Gide, c’est à la fois la rive gauche feutrée des libraires, des cafés et des maisons d’édition, et la rive droite, innombrable, vertigineuse, des boulevards et des piscines.
L’AUTEUR
Frank Lestringant est professeur émérite à la Sorbonne. Il a publié une quarantaine de livres. Il a publié notamment L’Atelier du cosmographe ou l’image du monde à la Renaissance, (Albin Michel, 1991) et il est l’auteur des biographies de Musset et d’André Gide (Flammarion, (1999 et 2012).
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