LA GARDE-FREINET Rezvani

LA GARDE-FREINET

Rezvani et les Maures
par Frédéric Vitoux
(extrait)

 

 

Que dire de Rezvani et du massif des Maures, de sa maison de « La Béate » près de la Garde-Freinet, des années qu’il y passa auprès de Danièle, de l’influence de ce décor sur son œuvre et sa pensée ? Ces questions sont essentielles mais aussi embarrassantes. Ou plutôt les réponses – innombrables – qui nous viennent évidemment à l’esprit semblent déjà avoir été toutes fournies par l’auteur lui-même. J’avance à dessein le nom d’« auteur » bien sûr, au sens général du terme, et non pas celui d’écrivain, puisque ce pays adopté par lui (les vraies patries sont toujours celles que l’on se choisit, disait Stendhal qui se pensait Milanais de cœur ou Italien de passion), il l’a décrit, chanté, commenté, admiré et critiqué aussi bien dans ses romans, dans ses livres autobiographiques, dans ses chansons que dans ses tableaux et ses dessins. Autant dire que sa Provence a occupé une part essentielle de son œuvre et que le risque est grand, en s’efforçant de l’évoquer à notre tour, de ne faire que paraphraser Rezvani lui-même.

J’ai parlé de choix.

En vérité, ce pays fut d’abord pour lui la marque d’un refus, ce qui n’est pas tout à fait la même chose. Comme Stendhal, revenons-y un instant, qui a aimé et inventé une Italie sans doute imaginaire pour mieux décrier une France abhorrée et médiocre, qu’il jugeait après la Restauration, béotienne, bigote et désespérante, peut-être, pour Rezvani, la Provence et ses chères collines des Maures furent-elles d’abord la conséquence ou l’aboutissement d’une fuite, la détestation de Paris, de la grande ville, du bruit, de la pollution, de la vie sociale frelatée et  bruyante, des mensonges en tout genre et, ce qui est pire encore, de la promiscuité imposée avec ses confrères, avec les intellectuels, les faux artistes, les vrais médiocres, les journalistes douteux, les malveillants irréfutables, toute cette écume médiatique et surfaite en un mot qui semblait l’asphyxier. Le Midi, pour lui, représenta d’abord ce qui était loin de Paris. La chance de la solitude. Un éloignement de toutes les intimités imposées ou de toutes les compromissions – ce qui revient à peu près au même. Rezvani, tel un nouveau Robinson en délicatesse avec son époque et ses contemporains, était à la recherche d’une île. Sa maison de « La Béate », au creux de son vallon des Maures, cette sorte de paradis en réduction, fut précisément pour lui ce refuge à l’écart du monde. Il y respira. Elle fut par contrecoup son inspiration.

[…]

 

Extrait de l’ouvrage : Balade dans le Var, sur les pas des écrivains (c) Alexandrines, février 2010.

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