DOUARNENEZ
Georges Perros, Douarnenez ou la terre promise
par Marc Le Gros
Georges Perros n’est pas natif de Bretagne, comme on pourrait l’imaginer. Mais le « vrai nom » n’est pas toujours celui qu’on croit. Est-ce le Poulot de l’état civil qui le fit naître à Paris, dans le quartier des Batignolles un 31 août 1923 ? Ou bien ce nom de « dilection », comme disait Suarès, ce nom que le cœur a choisi et dont les consonances rugueuses désignent à l’évidence, par une sorte de tropisme implacable et secret, une géographie intime, une terre à la fois réelle et mentale, cette terre de l’ouest qu’il avait élue et où, de son propre aveu, il respirait mieux que nulle part ailleurs ?
La petite enfance du poète est itinérante, ballotée au gré des nominations d’un père qui travaille dans les Assurances et qui aime la musique : Reims, Belfort, Rennes, Paris enfin et Meudon où il aura longtemps sa chambre et son piano.
À dix-sept ans, le jeune Georges Poulot fréquente le lycée Condorcet où il fait sa rhétorique. Il ne passe pas son bac mais suit des cours de théâtre et lit beaucoup. Il rencontre surtout Gérard Philipe, le frère qu’il n’aura pas eu, le substitut sans doute de ce « jumeau mort-né » dont il parlera souvent. Il lui restera lié jusqu’à la fin tragique de celui qui fut en 1953 un Prince de Hombourg fascinant, une sorte d’ange, une créature bénie des dieux. Le Prince donnait la réplique dans la pièce de Kleist à la Princesse Nathalie d’Orange qu’interprétait une certaine Jeanne Moreau, la même qui offrira à Perros la mythique « motocyclette » qu’on connaît et avec laquelle il dira Ken Avo à la Capitale.
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Extrait de La Bretagne sud des écrivains, Alexandrines, 2014.