De Nîmes à Génolhac
Jean-Pierre Milovanoff « Je crois aux attachements… »
par Bernard Bastide
(extrait)
Un regard pétillant d’intelligence, embusqué derrière des lunettes arrondies. Un verbe puissant à l’accent trahissant vite ses origines méridionales. Une simplicité naturelle qui lui fait toujours préférer la fréquentation des humbles à celle des mondains….
Né le 15 juillet 1940 à Nîmes, Jean-Pierre Milovanoff est le fruit des amours d’un ingénieur d’origine russe et d’une institutrice d’ascendance languedocienne. Une naissance placée sous le signe de la dualité, « de deux mondes faits pour se méconnaître » :
« Il y a en moi le mélange du feu et de la forêt, le pessimisme de la Méditerranée et la mélancolie de la steppe », confesse le romancier à propos de son ascendance.
La terreur rouge et la guerre civile ont fait des dizaines de milliers de morts en URSS quand, en 1919, son père Paul, forcé à l’exil, tourne le dos à sa Russie natale et à tous les siens. Après bien des pérégrinations à travers l’Europe, il choisit de s’installer dans le sud de la France en raison de la présence des mines et de la douceur du climat qui lui rappelait le sud de l’Ukraine ou de la Crimée. Sa mère, Renée, jeune fille sans histoire d’origine occitane, coiffée à la Louise Brooks, décide, un beau jour de 1936, d’épouser contre l’avis de sa famille cet ingénieur russe qui avait pris la direction du laboratoire des mines de Villemagne (Hérault).
Dans les premières années de l’après-guerre, le couple désargenté occupe des logements de fonction successifs, déménageant au gré des affectations de l’institutrice. Après une première nomination dans un petit village du Gard, la famille s’établit pour trois ans à Saint-Gilles, aux portes de la Camargue. « C’est à partir de Saint-Gilles-du-Gard […] que je découvris la première beauté du monde, se souvient l’écrivain. Celle qui naît du combat que se livrent les éléments. J’appris à aimer le delta, ce territoire de reflets où les catégories s’enlisent, se reversent l’une dans l’autre. »