René de Girardin à Ermenonville

ERMENONVILLE

René de Girardin et Ermenonville
par Geneviève MAZEL
(extrait)

Ce n’est donc ni en Architecte, ni en Jardinier, c’est en Poète et en Peintre qu’il faut composer des paysages. En 1763, c’est par la grande route des Flandres, bordée de deux rangées d’arbres monotones, que le marquis René de Girardin et sa jeune femme quittent Paris pour Ermenonville. A Louvres, leur voiture emprunte, à droite, un chemin qui les conduit à Plailly et à Mortefontaine.  Puis, après avoir suivi le mur qui borde le grand parc du château de ce village, leur voiture traverse une lande aride et sablonneuse, coupée de maigres cultures. Enfin voici, un peu caché par les arbres, le village d’Ermenonville, bâti en amphithéâtre sur un coteau qui domine une vallée étroite. C’est alors que le marquis découvre une large enceinte crénelée, couronnée de tours, entourant un vaste château qui, certes, ne manque pas d’allure, mais quelle forteresse… René de Girardin en est,  depuis quelques mois, le propriétaire. Son grand-père, le riche fermier général René Hatte, le lui a laissé en héritage, accompagné d’un confortable capital.

Après avoir franchi la lourde porte, les Girardin arrivent devant le château, en forme de U ; au début du siècle, des travaux importants avaient modernisé les façades en y ajoutant de très beaux frontons, des mascarons et des balcons aux élégantes ferronneries, mais l’ensemble ne correspond vraiment plus au goût du jour. Deux ponts-levis permettent de sortir du château. Au nord, on accède à un parterre humide, garni de modestes charmilles se terminant sur de vilains marécages. Ausud, la petite cour d’honneur est entourée de lourds bâtiments, fermant la vue. Entre l’enceinte et un grand potager clos de murs, passe la route de Senlis à Meaux : «cette rue, l’égout du pays, servait d’avenue au manoir», écrira un contemporain… Dès le premier jour, le nouveau propriétaire sait que tout cela va changer : il a des projets plein la tête. Le jeune marquis possède la fortune nécessaire pour entreprendre les immenses travaux qui vont transformer ces landes tristes et ces marécages sauvages en paysages riants et paisibles. Il lui faudra dix ans pour réaliser cet ensemble, unique à l’époque, qu’est Ermenonville.

Issu d’une ancienne famille florentine, émigrée en France à une époque lointaine, René de Girardin était né à Paris, le 24 février 1735. Après de bonnes études il embrasse la carrière des armes, puis quitte l’armée qu’il n’aime pas et part pour Lunéville. Déjà un peu philosophe, il fréquente avec plaisir la petite cour lettrée du roi Stanislas, beau-père de Louis XV.Désireux de s’instruire et de découvrir d’autres horizons, il part pour l’Italie, dont il aime la campagne, traverse l’Allemagne, puis débarque en Angleterre. C’est la grande découverte de son voyage. L’Angleterre, en plein développement agricole, est le pays des routes en macadam, et des jardins à l’anglaise. C’est une révélation !

[…]

 

Extrait de l’ouvrage : Balade en Oise, sur les pas des écrivains (c) Alexandrines, mars 1998.

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