QUIMPER
Avec Elie Fréron,
quimpérois de choc et de bonne compagnie
par Jean Balcou
Tout le monde au XVIIIe sait que Fréron est de Quimper, et même de Quimper Corentin. Non pas tant parce que dans le combat du temps, le plus formidable combat idéologique de notre histoire, il s’est fait une sacrée réputation. Ni parce qu’avec son Année littéraire il a fondé un empire de la presse. Ni parce que ses prises de position contre la pensée dominante ont fait de lui une vedette de l’opposition à ceux qu’on appelle les « philosophes ». Ni même parce qu’il a lui aussi une la plume militante. Pour tout cela, bien sûr, mais surtout parce que pendant 30 ans il est en train d’empêcher le plus fameux d’entre eux, le grand Voltaire lui-même, de dormir. C’est pourquoi il sera l’homme à abattre et par tous les moyens, assassinat tout de même exclu.
Pour Voltaire, Fréron ne se prénomme plus Elie, mais Martin, ou Jean car J. F pour Jean Fréron cela fait jean foutre. Quant à l’âne (L’Année littéraire) de son château, mais
C’est notre ami Fréron de Quimper Corentin.
Rassurons-nous ; ces plaisanteries ne sont rien à côté de ce qui suit : suspensions du journal, emprisonnements, toute une pièce de théâtre jouée en pleine Comédie Française pour le disqualifier avec campagne pamphlets pour le lyncher, insultes permanentes sauf quand on veut l’acheter, un tombereau d’injures que sont Anecdotes sur Fréron pour le traîner devant les tribunaux. Etre de Quimper devient même une tare. Heureusement que
Certain jour au fond d’un vallon
Un serpent mordit Jean Fréron
Que pensez-vous qu’il arriva ?
Ce fut le serpent qui creva.
Oui, heureusement, car, comme dit Fréron à la réception de cette nouvelle épigramme, « il n’y a pas grand mal à cela si Voltaire est le serpent. Il a tout l’air de crever de rage et un peu de mon venin ». Il tient bien le choc, ce Quimpérois !