Bordeaux
C’était le temps des Gascons,
par Éric Astié Babinot
(extrait)
Pauvre Mèste Verdié ! Il n’y a pas de quoi gointer des coulacs à la matolle… Plus explicitement… casser trois pattes à un canard. Sa mince postérité est à l’image d’une petite rue et d’une impasse qui portent son nom : à Bordeaux d’abord où la rue du poète est coincée entre le pont d’Aquitaine et la piscine Tissot, et à Saint-Médard-en-Jalles. Là quand même, il peut se consoler d’être aux côtés de la rue Jaufré-Rudel, prince troubadour de Blaye, et de la rue Frédéric-Mistral, fondateur du Félibrige et prix Nobel de Littérature en 1904. La langue occitane relie ces trois poètes.
Jean Antoine Verdié dit Mèste[ii] Verdié voit le jour à Bordeaux le 11 décembre 1779. Il est issu de la gentalha, le petit peuple bordelais. Ce sont les pavés du quartier Saint-Seurin, ses places publiques où il vend les gâteaux et le pain de son papa boulanger qui le voient grandir. Jean-Antoine a de l’esprit, il s’intéresse vite aux journaux et aux revues, qu’il vend aussi entre deux fournées.
En 1806 il se marie avec une jeune ouvrière, ils ont cinq enfants, une seule survivra, Marie. La vie est dure pour les Verdié. En 1807, Jean-Antoine travaille avec son père à la boulangerie. Trois ans plus tard, il est appelé à Bayonne à l’hôpital militaire car outre la boulange (peut-être rue Panecau qui signifie pain chaud), il est aussi infirmier. À cette époque, la guerre fait rage dans une Espagne qui use les forces napoléoniennes. L’hôpital de Bayonne est en première ligne, Jean-Antoine y soigne les nombreux blessés victimes de la terrible guérilla espagnole. « Bayonne est une ville où la culture occitane est très vivante, avec notamment le chansonnier Pierre Lesca révèle Philipe Gardy. À partir de son retour à Bordeaux, dans le quartier Saint-Seurin, Jean-Antoine deviendra peu à peu Mèste Verdié, comprenons Maître Verdié. Son retour à Bordèu correspond à celui des Bourbons sur le trône de France, le démon de l’écriture saisit alors notre homme. »
[…]