Jean-Pierre Chabrol à Alès

Alès – Chamborigaud

Jean-Pierre Chabrol, l’enfant de Pont-de-Rastel,
par Robert Caracchioli
(extrait)

 

 

Jean-Pierre Chabrol nous a quittés dans la nuit du 30 novembre au 1er décembre 2001, laissant orphelins tous ceux à qui il avait fait aimer « sa » Cévenne (il employait de plus en plus souvent le singulier pour parler d’elle). La légende s’est déjà emparée de lui puisque de nombreux textes l’ont fait mourir dans sa propriété familiale, au Gravas, alors qu’il est mort à l’hôpital de Ponteils, à quelques pas des châtaigniers qu’il a si bien chantés. C’est vrai qu’avec sa barbe blanche et ses cheveux blancs on avait fini par le prendre pour un prophète biblique, comme quelques-uns de ses personnages de romans, et que les prophètes – c’est bien connu – sont forcément immortels, ou meurent tout au moins chez eux… Jean-Pierre était un être passionné, excessif, « bourré de contradictions » selon ses propres termes, capable d’aimer comme de haïr ou de mépriser. Je le revois encore, douze années durant, discutant dans ma classe avec mes élèves, je revois encore ces garçons et ces filles de quinze ans parcourant livre en main les berges du Luech ou les plateaux du mont Lozère, je les revois encore veillant chez lui autour de la grande cheminée, car il les invitait chez lui… Comment ne pas ressentir une grande, une étrange émotion, au moment d’écrire cette trop courte biographie et de vous inviter à nous accompagner – livre en main vous aussi – sur les lieux de ses promenades…

Né à Chamborigaud en 1925, Jean-Pierre Chabrol a connu une enfance heureuse entre ses parents instituteurs et sa grand-mère paternelle, personnage haut en couleur qui a fortement marqué ses contes et ses romans. Plus observateur qu’imaginatif, comme il se plaisait à le rappeler, il s’imprègne à tout jamais des personnages qui peuplent cette enfance gardoise et plus spécifiquement cévenole. La vieille demeure familiale, Le Gravas, se dresse toujours avec une force discrète et tranquille au bord du Luech, sa rivière mythique, à quelques centaines de mètres du hameau de Pont-de-Rastel (« Clerguemort » dans la série des Rebelles), de son pont en dos d’âne, de sa filature abandonnée, de son temple et de son moulin. C’est le centre de son univers – réel et romanesque –, idéalement situé entre le mont Lozère, la vieille montagne biblique, et les mines toutes proches de la Vernarède (« la Vernasse » dans les romans) où la grandeur de l’homme se révèle dans les noires profondeurs du charbon et dans la poussière blanche et mortelle du travers-banc.

[…]

Extrait de l’ouvrage : Balade dans le Gard, sur les pas des écrivains (c) Alexandrines, mai 2008

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