Aix-EN-PROVENCE, Marseille
Le divin marquis et ces Messieurs du Parlement d’Aix
par Raymond Jean
En juin 1772, Donatien-Alphonse-François de Sade a trente-deux ans. Il vient de quitter le château de Lacoste dont son père est le seigneur – coseigneur en même temps que de Saumane et de Mazan – dans le Vaucluse. Il aime faire, de temps en temps, des échappées à travers la Provence.
II a choisi, ce 27 juin, de se diriger vers Marseille avec son valet Latour qui s’y connaît mieux que personne pour aborder les filles des rues et leur proposer des arrangements. Il porte une « matelote à rayures très voyantes, bleues et jaunes qui le fait un peu ressembler au Sganarelle de Molière. Le jeune marquis, lui, est vêtu d’un frac gris doublé de bleu, veste et culotte de soie couleur souci, plumet au chapeau, épée au côté, canne à pommeau d’or à la main. Beaux cheveux blonds et sans doute une jolie mine. Mais on ne possède pas de portrait de Sade. Il est descendu à 1’hôtel des Treize-Cantons et s’est rendu à la rue Saint-Ferréol-le-Vieux pour rencontrer une jeune fille dont on lui a communiqué l’adresse. Latour, lui, a pris contact avec une jeune prostituée de dix-huit ans, prénommée Marianne. On attend encore d’autres jeunes personnes, Mariannette et Rose. La rencontre doit avoir lieu au 15 bis de la rue d’ Aubagne, à l’angle de la rue des Capucins. Aujourd’hui la maison de la rue d’Aubagne existe toujours. Une façade noire. Quatre étages. Quatre fenêtres par étage. Vieux volets noirs clos pour la plupart, sauf dans le haut. À l’époque, la rue était populeuse et mal famée. Dans un grand port comme Marseille, la prostitution s’y nichait et était une des ressources de la misère.
Ce qui s’y passa fut sans doute très « sadien ». Les jeunes filles se mettent nues, se couchent sur des lits ou des matelas, reçoivent des coups de fouet, puis sont fustigées avec un balai avant de subir les marques d’un canif. Caresses et sodomisation. Latour s’y prend très bien pour satisfaire son maître…
Extrait de l’ouvrage : Balade en Provence, sur les pas des écrivains (c) Alexandrines, mars 2012