Maupassant canotier,
de la Maison Fournaise à la Grenouillère,
par Noëlle Benhamou
Pour le public, Guy de Maupassant (1850-1893) est lié à la Normandie, sa région natale, toile de fond de nombreux récits. Mais l’enfant du pays de Caux connaissait aussi la Seine-et-Oise, où se situe l’actuel département des Yvelines. Il y vécut par intermittence, aima, écrivit, trouva une source d’inspiration mais contracta aussi la maladie qui devait l’emporter.
Installé à Paris après la guerre de 1870, le jeune Provincial étouffe dans sa petite chambre de la rue Moncey (9e). Il a besoin du contact avec l’eau. Son entrée comme surnuméraire au Ministère de la Marine en 1872 lui assure un tarif d’¼ de place sur les voyages en chemin de fer. Guy peut désormais se rendre en banlieue à peu de frais pour respirer à pleins poumons et oublier la monotonie de son emploi de bureau qu’il ne quittera comme commis de 4e classe qu’en 1878. Habitant à deux pas de la Gare Saint-Lazare, il attend avec impatience les échappées à Argenteuil, qui n’est désormais, progrès oblige, qu’à vingt minutes de la Capitale.
Lorsqu’il ne passe pas le dimanche chez Flaubert, Maupassant rejoint les bords de Seine. Le Maître est inquiet de l’attrait qu’exerce ce fleuve sur le jeune Guy : « Je crois notre jeune garçon un peu flâneur et médiocrement âpre au travail. » Au printemps 1873, le jeune homme loue une chambre avec des canotiers à Argenteuil, à l’enseigne du « Petit Matelot », où il passe l’été. Il fonde l’Union des Crépitiens avec des amis : La Tôque (Robert Pinchon), Petit-Bleu (Léon Fontaine), Tomahawk (Henri Brainne), Hadji (Albert de Joinville). Lui, se fait appeler « Maistre Joseph Prunier, canoteur ès eaux de Bezons et lieux circonvoisins », pseudonyme dont il signe l’un de ses premiers contes : La Main d’écorché. Commandant de l’Étretat, il navigue ensuite sur sa yole La Feuille à l’envers, nom d’une spécialité érotique utilisée comme titre d’une pochade pornographique écrite en commun : À la feuille de rose, maison turque…
Extrait de l’ouvrage : Balade en Yvelines, sur les pas des écrivains (c) Alexandrines, 2011.